24 novembre 2022
La Commission européenne a renouvelé le 15 novembre l’autorisation d’utilisation du glyphosate pour un an, jusqu’en décembre 2023. En s’abstenant, la France a de facto approuvé cette décision autorisant la poursuite de l’usage de l’herbicide classé « cancérogène probable » par le Centre International de Recherche sur le Cancer et destructeur de la biodiversité.
Commercialisé par Monsanto depuis 1974, le glyphosate est le pesticide le plus vendu au monde. En France, il représente à lui seul un tiers des pesticides répandus, avec près de 9000 tonnes écoulées au service du désherbage.
Malgré le scandale démocratique des Monsanto Papers, malgré la toxicité avérée de ce poison pour la santé et le vivant, malgré la promesse d’interdiction prononcée en 2017 par Emmanuel Macron qui avait vite lâchement renoncé sous la pression des lobbies, l’autorisation de mise sur le marché dans l’Union européenne avait été renouvelée pour cinq ans, jusqu’en 2022. Une décision dramatique au regard des impacts massifs du glyphosate sur la santé humaine et les équilibres du vivant.
C’est dans ce contexte que quatre état membres de l’Union européenne (la France, la Hongrie, les Pays-Bas, la Suède) avaient reçu pour mission d’évaluer les risques relatifs aux divers usages du glyphosate (sur la santé humaine par l’alimentation ou l’exposition, ou sur la biodiversité). Leur avis devait ainsi être publié en juin 2021, pour fonder la décision de la Commission européenne de prolonger – ou pas – la licence du glyphosate.
Comme par hasard, cette réévaluation a tourné à la pantalonnade. La qualité pitoyable des travaux rendus, à la fois incomplets, partiaux et superficiels, a permis de justifier la proposition de la Commission européenne de renouveler pour un an l’autorisation du glyphosate. L’agriculture chimique semble donc avoir un bel avenir en Europe, entrainant avec elle maladies, extinction du vivant, dépérissement des petites exploitations et la mort à petit feu des paysannes et paysans.
Ainsi, loin d’appliquer le principe de précaution, loin de défendre la préservation du Vivant et la santé humaine dans le cadre d’une vision « One Health », les États membres, dont la France, continuent à orchestrer la destruction de la vie des sols, des plantes, des animaux et des écosystèmes, sans qu’ils en soient par ailleurs pour le moins inquiétés.
La tragique ré-autorisation des néonicotinoïdes en 2021, après leur interdiction depuis 2018, s’inscrit hélas dans cette course à l’effondrement, que le gouvernement d’Emmanuel Macron pourrait bien finir par remporter ! Si cette irresponsabilité collective au plus haut niveau de l’État ne s’est pas encore mue en culpabilité d’un point de vue juridique comme dans le cas de l’inaction climatique, elle ne fait pourtant aucun doute si l’on adopte le point de vue du Vivant, victime discrète et silencieuse au printemps comme aux autres saisons… Rachel Carlson, célèbre biologiste autrice du livre « Printemps silencieux » il y a cinquante ans, appréciera.
Anne-Laure Bedu et Éric Poujade