26 avril 2023
« Infamous »… C’est ainsi que les effets de la phosphine étaient qualifiés par les scientifiques anglais dès 2011. Pourtant suite à de sombres tractations où les enjeux économiques priment avant tout, voilà qu’après un long chemin, elle pourra poursuivre son trajet sur les bateaux vendue comme raticide et insecticide… donc loin de chez nous.
Derrière ce joli nom de « phosphine » se cache un poison extrêmement violent, très peu odorant mais volatil comme du cyanure, cette fois un nom qui fait peur. La phosphine va bloquer la respiration cellulaire au même titre que le cyanure, d’ailleurs utilisé lui aussi précédemment comme raticide dans les cales de navires à défaut de servir à occire les empereurs romains. La phosphine est libérée en présence d’eau à partir de sels métalliques (aluminium, zinc ou magnésium) de phosphore. De nouveau comme le cyanure, elle tue tout ce qui respire notamment en interagissant avec la cytochrome oxydase des mitochondries. Au même titre que plus de 15 % des pesticides vendus en France, il s’agit donc d’un pesticide mitotoxique de plus.
Pourquoi en parler ? Parce qu’il s’avère que son autorisation, pourtant programmée par l’Anses pour être enfin annulée, sera prolongée toujours par décision de notre Anses nationale sous la pression du gouvernement. Cette autorisation est limitée au traitement des cargaisons de céréales exportées à destination de nos partenaires commerciaux de par le monde, bien souvent des pays pauvres. Mais rassurez-vous, chez nous en France la phosphine, extrêmement toxique, et apparemment à l’usage entrainant bien trop d’accidents gravissimes, n’est pas autorisée…
En échange, comme une sorte de contrepartie, non explicite bien entendu, de cette amorale prolongation, la France se pliera à l’interdiction européenne du S-métolachlore dont nous avons précédemment parlé ici-même. Vent debout contre cette interdiction hésitante bien que l’on connaisse la toxicité environnementale du S-métolachlore depuis plus de 15 années, on retrouve la coalition de toute la chaîne du cartel agro-industriel, mêlant l’industrie de la chimie, la FNSEA, les ministères de l’agriculture et de l’industrie. Dans ces discussions de marchands de tapis qui semblent entourer le pas de deux de l’Anses et du gouvernement sur la distribution de ces poisons, ce dernier n’en doutons pas sous pression de la FNSEA et de l’agrochimie, nulle question de science, nulle question de santé, encore moins de biodiversité ! Au mépris de toute attitude scientifique, l’argent au bénéfice de certains semble être la seule boussole : « infamous » vous dis-je…
Interdire l’usage généralisé de tous ces pesticides, phosphine, S-métolachlore, glyphosate, SDHI, chlorothalonil, néonicotinoïdes y compris, en France, mais aussi à l’exportation, comme le réclame instamment Génération Écologie apparaît une urgence toujours plus pressante, bien loin des discours dilatoires des princes qui nous gouvernent.
Pierre Rustin