22 avril 2019
Chaque année depuis 1990, l’ONU célèbre la « Journée internationale de la Terre » le 22 avril alors que les Américains la célèbre depuis 1970. C’est un événement qui mobilise 200 millions de personnes dans 140 pays. La Société Géologique de France (SGF) en profite pour célébrer le même jour la « Journée de la Géologie » ce qui est tout à fait logique puisque la Géologie c’est justement l’étude de la planète Terre.
L’étude de la Terre consiste à connaître sa composition, sa structure, son fonctionnement, ses réserves utiles et son histoire.
- Sa composition et sa structure sont relativement bien connus grâce aux progrès de la « géophysique » et de la « géochimie ».
- Son fonctionnement est loin d’être connu dans ses détails bien que la « théorie de la tectonique des plaques » ait permis le développement spectaculaire de la « géodynamique » .
- Ses « réserves utiles » qui sont la clef de l’avenir de l’humanité, sont relativement bien connues, malheureusement limitées et dans tout les cas gaspillées.
- Son histoire est aussi relativement bien connue depuis 4 milliards d’années grâce aux datations radiométriques, aux isotopes et aux fossiles. Cette connaissance est très importante car que pourrait-on dire de la France si l’on étudiait son histoire que depuis le quinquennat de Nicolas Sarkozy ?
Toutes ces connaissances sont indispensables pour anticiper les grands changements à venir et pour pouvoir les modéliser.
Quant à la géologie, on est loin de l’image d’Epinal du savant Cosinus en chaussure de marche se promenant avec une loupe en main pour distinguer les minéraux d’un morceau de caillou avant de l’envoyer au Musée. Le géologue d’aujourd’hui travaille dans un laboratoire bardée d’informatique encadrant des microscopes et des microsondes électroniques.
C’est ainsi qu’on a maintenant les moyens de « faire parler les sédiments » qui ont enregistré toutes les données sur leur environnement : température, climat, taux des gaz et notamment du CO2 et de l’oxygène,… avec une précision suffisante et ce depuis la grande glaciation « Marinhoan » d’il y a 635 millions d‘années. La climatologie à partir des glaces actuelles fournit des données plus précises, mais seulement sur 800 000 ans.
Dans la mesure où on peut dater une roche, soit par radiochronologie soit par les fossiles, on peut connaître les conditions de vie de l’époque du dépôt. Cette connaissance est indispensable, non seulement aux historiens mais aussi aux « prévisionnistes ». Car ce qui nous intéresse en tant qu’humain, ce n’est pas l’avenir de la planète qui, quelque soit les scénarios, a devant elle plus de 800 millions d’années, mais bien celui de l’humanité qui risque d’être écourté à quelques décennies si l’homme fait fi de l’écologie et ne change pas de comportement.
Terre vivante
Qu’est ce que la Terre : une planète morte ou vivante ? La question s’est posée lorsque la Nasa, qui avait l’ambition d’explorer de nouvelles planètes, pensait y rencontrer des organismes vivants. La problématique était donc de définir ce qu’est un être vivant.
En 1970 la NASA réunissait un groupe de scientifiques dont le climatologue James Lovelock, pour définir des critères permettant de distinguer un être vivant d’un objet inerte. Aussitôt dit aussitôt fait. On s’est aperçu alors, avec surprise, que la planète Terre répondait positivement à un certain nombre de critères établis par ce groupe d’experts : maintien de la température par transpiration des océans, constitution de réserves, présence d’une atmosphère permettant la colonisation de la biosphère, adaptation par transformation aux conditions physiques de l’environnement, etc. D’où l’hypothèse « GAIA » qui a fait couler beaucoup d’encre.
Bien entendu, cette hypothèse eut ses détracteurs car la Terre n’a pas toutes les qualifications d’un être vivant : pas de cerveau central, pas de liberté de locomotion, pas de moyens de reproduction, etc. Mais elle a tout de même des différences intéressantes avec les autres planètes, intéressantes surtout pour notre biosphère et pour nous autres pauvres humains, à savoir : une température stable et compatible au développement de la vie ; de l’eau pour boire, cultiver et naviguer ; une atmosphère avec de l’oxygène permettant de respirer, de faire du feu, de voler et surtout de transporter des ondes pour parler et communiquer. Elle a aussi un sol fertile pour cultiver, des réserves minérales et énergétiques en quantité et des climats variés, etc. Bref, tout ce qui nous semble naturel et immuable alors que c’est une exception dans l’univers et qu’elle est soumise aux lois du temps et aux caprices des humains.
Aujourd’hui, 22 avril le monde entier célébrera dans 140 pays cette Terre pour la remercier de ses bienfaits en espérant que les humains comprendront que ce paradis peut, à tout instant, se transformer en enfer à la moindre erreur d’aiguillage du capitaine et des officiers de bord.
Michel Villeneuve, Géologue géodynamicien, directeur de recherche honoraire au CNRS, délégué scientifique de Génération Ecologie.