16 février 2022
Retrouvez la vidéo de la conférence « Entreprises et décroissance : (p)oser le débat » organisée le 15 février dernier à l’ESCP.
« Il fut un temps où les limites à la croissance appartenaient à un futur éloigné. Elles sont bien là, aujourd’hui. Il fut un temps où le concept d’effondrement était inconcevable. Il fait aujourd’hui son apparition dans les discours publics, même s’il renvoie encore une à réalité lointaine, hypothétique et abstraite. Nous estimons qu’il faudra encore 10 ans pour pouvoir observer clairement les conséquences du dépassement et 20 ans pour que le dépassement soit accepté comme un état de fait. » (The Limits to growth, édition de 2004, Préface des auteurs)
Près de 20 ans après l’écriture de ces lignes par Dennis Meadows et Jorgen Randers, nous y sommes : effondrement de la biodiversité, pénuries de matières premières et de composants, menaces de blackout, sécheresses et événements climatiques extrêmes… Les signaux d’alerte sont nombreux et confortent le constat formulé dès le début des années 1970 par les auteurs des Limites à la croissance : le modèle économique fondé sur la croissance infinie du PIB, qui fait fi des contraintes physiques, n’est pas soutenable et met en péril l’équilibre de nos sociétés.
Confrontées à ces menaces, les entreprises s’adaptent – avec plus ou moins de sérieux – et affichent des ambitions de réduction de leur empreinte écologique. Mais s’il est désormais banal pour elles de revendiquer un objectif de « neutralité en carbone », oser ouvrir le débat sur la « décroissance » reste tabou. Parce qu’elle signifie sans détour la nécessité de rompre avec la boussole du PIB, la décroissance est un projet clair qui provoque des réactions vives. Sa radicalité séduit les acteurs du monde privé qui ont compris l’ampleur de la redirection écologique à engager, en même temps qu’elle soulève de nombreuses questions :
- La décroissance est-elle synonyme de récession ?
- Comme projet politique, ne contredit-elle pas l’idée qu’une entreprise qui réussit est immanquablement vouée à croître ? Et corollairement, suppose-t-elle une réduction uniforme de l’activité économique ?
- Quelle articulation ménage-t-elle entre puissance publique et initiative privée ?
- Quel imaginaire a-t-elle à opposer à celui de la Start-up nation et à son héros, l’entrepreneur conquérant, qui n’entrevoit les limites que comme de nouvelles frontières à franchir ?
La conférence a été animée par Alexandre FLORENTIN (Conseiller de Paris, directeur de la Carbone 4 Académie) et Cédric VILLANI (Député de l’Essonne, médaillé Fields)
● INTERVENANTES ET INTERVENANTS
Aurélien Acquier – Professeur de durabilité à ESCP Business School, Aurélien Acquier codirige la chaire ESCP en Économie Circulaire. Ses recherches portent sur le rôle sociétal et politique de l’entreprise en lien avec les enjeux de soutenabilité.
Delphine Batho – Députée des Deux-Sèvres, ancienne ministre de l’Ecologie, du développement durable et de l’énergie, présidente de Génération Écologie, auteure de « Ecologie intégrale, le manifeste ».
Alain Grandjean – Fort de 30 ans d’expérience dans diverses entreprises, Alain Grandjean est l’auteur de plusieurs livres et rapports sur l’économie et la transition écologique. Il est associé-fondateur du cabinet Carbone 4 et anime les sites https://alaingrandjean.fr et https://theothereconomy.com.
Timothée Parrique – Docteur en économie, a mené sa thèse sur « l’économie politique de la décroissance », et consacre ses recherches à la décroissance et au découplage. Il publie une partie de ses travaux sur https://timotheeparrique.com.
Fanny Picard – Fondatrice et CEO d’Alter-Equity, premier fonds français dans le non-côté ayant eu pour stratégie de financer les nécessaires transitions sociales et environnementales. Alter Equity gère aujourd’hui deux fonds de capital-développement et 17 participations.
Sophie Robert-Velut – Directrice Générale des Opérations Dermo-cosmétique d’Expanscience (Mustela), après avoir exercé 16 ans chez l’Oréal. Soucieuse de concourir à la transition écologique, elle a rejoint la Convention des Entreprises pour le Climat.
Yannick Servant – Après un cursus à HEC et 8 années passées dans le monde de la tech (Google, Plume Labs), s’est engagé pour la transition environnementale en fondant la Convention des Entreprises pour le Climat, imaginée pour résoudre la dissonance entre urgence écologique et priorités économiques.