Hit-parade du climato-obscurantisme : l’extrême droite défend les passoires thermiques

01 novembre 2024

Le choc inflationniste sur les prix de l’énergie ? Les ménages qui renoncent à se chauffer ? Les logements si mal isolés qu’on peut y mourir de chaleur lors des canicules ? Qu’importe aux yeux de l’extrême droite ! L’urgence est d’abroger la loi contre les passoires thermiques.

C’est un texte passé inaperçu, inscrit à l’ordre du jour de la « niche » parlementaire du RN le 31 octobre à l’Assemblée nationale : une proposition de loi pour la suppression pure et simple de l’article 160 de la loi climat et résilience de 2021. Cet article, bien que très « mou » et ne reprenant que partiellement une proposition importante de la Convention Citoyenne pour le Climat, a pour objectif la rénovation des logements locatifs qui sont des passoires thermiques. Plus précisément, ce dispositif prévoit un calendrier (trop) progressif de gel des loyers et d’interdiction de mise en location des logements-passoires considérés comme indécents : depuis 2023 pour les logements G+, en 2025 pour les logements G, 2028 pour les logements F, 2034 pour les logements E. Il s’agit donc d’une mesure élémentaire, qui relève du service minimum écologique et social. Le Haut Conseil pour le Climat l’avait d’ailleurs jugée comme manquant d’ambition lorsqu’elle avait été adoptée. Quoi qu’il en soit, cette disposition concerne autant la réduction des émissions de gaz à effet de serre que la justice sociale et la lutte contre la précarité énergétique. Rappelons que plus de 5 millions de logements sont concernés et que la précarité énergétique touche entre 7 à 12 millions de personnes en France. Avoir froid, dépenser trop pour se chauffer, crever de chaud l’été, est le lot quotidien d’un nombre considérable de locataires du parc privé. Sans surprise les familles monoparentales, les travailleuses et travailleurs pauvres, les personnes âgées qui ont des toutes petites retraites, sont les plus concernées. 

La France manque depuis des années d’une politique puissante de rénovation des logements et de sobriété énergétique. Pire, le dispositif MaPrimRénov’, qui devrait permettre de soutenir les petits propriétaires bailleurs qui ont besoin d’aide au financement des travaux, est amputé par l’austérité budgétaire d’un milliard d’euros. Qu’à cela ne tienne, l’extrême droite propose d’aller jusqu’au bout de la capitulation climatique avec l’abrogation pure et simple du dispositif normatif existant. Elle l’accuse d’être responsable de la crise du logement, passant sous silence les effets conjugués de la hausse des taux d’intérêts, de la baisse du pouvoir de vivre, des dispositifs fiscaux et des dérives de « Airbnb-isation » du parc locatif.

La proposition de loi du RN est à mettre au hit-parade du climato-obscurantisme. Elle est l’acte politique qui matérialise la conséquence concrète des déclarations des députés d’extrême droite selon lesquelles les scientifiques du GIEC « ont tendance à exagérer » et sont des « propagandistes », le changement climatique doit être considéré comme une « hypothèse », ou encore que « rien ne prouve l’effet de serre du CO2 » !

Fort heureusement, le Parlement a rejeté ce texte. Mais l’épisode en dit long sur le programme politique de l’extrême droite dont l’ordre du jour est cyniquement l’affrontement avec la science, avec le climat, avec les catégories populaires.

Intervention de Delphine Batho le 31 octobre 2024 à l’Assemblée nationale