17 avril 2023
Une nouvelle génération d’artistes politise les enjeux féministes autour des corps féminins, point central de la domination masculine à travers les âges et les civilisations.
Dans un documentaire foisonnant, drôle et incisif, la réalisatrice Nina Faure étudie les rapports entre les sexes en partant de la sexualité des femmes, trop longtemps reléguée dans le domaine de l’incompréhensible, voire du dangereux. En effet, alors que même l’anatomie des femmes n’était pas étudiée, la médecine moderne trouvait déjà des remèdes contre les maux de la sexualité masculine.
Nina Faure dénonce à travers une parole donnée à des femmes de tous horizons, cette absence du plaisir féminin au cœur des relations hétérosexuelles, culturellement dominées par un utilitarisme masculin et patriarcal. Sa “chronique d’une révolution féministe” invite chaque femme à une nouvelle réflexion sur la dimension politique de nos intimités, afin de passer un nouveau cap dans les luttes pour l’égalité et l’émancipation des femmes.
En effet, si nos aînées ont acquis de haute lutte une relative égalité et dignité des femmes dans le droit français, elle est loin d’être aboutie, et nos vies de femmes sont encore trop souvent jalonnées de harcèlements et de violences.
Cet état de fait peut trouver une explication dans le tabou de la sexualité, qui laisse inexploré l’angle mort que constituent pour beaucoup nos intimités dans les luttes féministes. Nous avons intériorisé par notre éducation et notre culture, le sexisme et la misogynie, cette haine de nos propres corps qui nous empêche d’abolir totalement le patriarcat dans nos esprits en premier lieu. Aussi, la résistance des hommes que nous aimons, qu’elle soit passive où assumée, nous entrave dans notre chemin vers l’émancipation. Et nous les femmes de culture patriarcale, nous y soumettons parce que nous n’apprenons pas à couvrir nos besoins affectifs autrement que dans les relations hétérosexuelles.
C’est pourquoi Nina Faure nous propose à la fois le partage entre les femmes, et l’extension de nos luttes vers nos sphères intimes, pour expulser le patriarcat des dernières niches qu’il lui reste. Peut-être arriverons-nous alors à reconnaître notre force, celle des femmes, des mères, des aidantes et des soignantes qui, chaque fois qu’elles se sont arrêtées de travailler dans l’histoire, ont obtenu des avancées avec une efficacité redoutable, car seules capables de mettre un pays à l’arrêt, toutes classes sociales confondues.
Nina Faure qui avait commencé par une recherche du plaisir féminin termine ainsi : la grève des femmes comme perspective de lutte pour les droits, dans la joie et la sororité.
La commission écoféminisme de Génération Écologie souligne l’importance de ce film, et invite à soutenir sa diffusion en organisant des projections dans les cinémas indépendants dans les territoires.
Anaïs Widiez & Hélène Roche