21 octobre 2024
Le nouveau livre de Victor Castanet, Les Ogres, révèle les déviances des crèches privées et de scandaleuses affaires de maltraitance envers les enfants. Focus sur les solutions qui permettent au contraire d’améliorer la qualité de l’accueil des jeunes enfants dans nos communes, et favorisent le bien-être des parents et du personnel encadrant.
Deux élus de Génération Écologie témoignent : Coralie Cocheteux est adjointe à la petite enfance dans la commune du Pré-Saint-Gervais en Seine-Saint-Denis, qui compte 17 000 habitants. Didier Gilles est vice-président à la communauté de communes du Pont du Gardet délégué à l’environnement, la gestion et la valorisation des déchets de ce territoire de 25 000 habitants.
Quelle était la situation dans votre commune quand vous avez pris vos fonctions ?
Coralie Cocheteux : J’ai tout de suite fait le constat que les services de la petite enfance étaient éclatés dans la ville. Le parcours pour les jeunes parents n’était pas simple. Les lieux d’accueil étaient vétustes, trop petits et certains n’étaient même pas accessibles aux personnes en situation de handicap. De plus, il manquait un lieu central dédié aux 0-6 ans, permettant l’accueil des enfants mais aussi des parents, pour favoriser les échanges et les réponses à toutes leurs questions.
Didier Gilles : Sur mon territoire, les cinq crèches et les deux micro-crèches étaient déjà en régie. Elles emploient 90 employés, soit plus de deux tiers du personnel intercommunal. Après six mois de discussions au sein de l’équipe intercommunale, nous avons acté qu’il y avait un besoin de rénovation et d’équipement des crèches.
Quels projets avez-vous mis en œuvre et quelle en a été l’ampleur ?
Coralie Cocheteux : Nous avons rénové un espace existant et végétalisé deux espaces avoisinants dans le but d’accueillir une halte garderie, le relais petite enfance 0-6 ans, un relais d’assistantes et assistants maternels et un lieu d’accueil enfant-parent. Les travaux ont duré un an et demi et ont coûté un peu plus d’un million d’euros. Nous avons conçu un intérieur lumineux et agréable, avec des matériaux sains : bois brut, peintures et sols sans solvant ni polluant. Une grande partie de la parcelle a pu être déminéralisée. Nous avons placé la nature au centre du projet avec de la pleine terre à la place du bitume, des plantations et bientôt un potager pour les enfants. Nous avons aussi créé un nouveau jardin avec des petites collines enherbées sur lesquelles les enfants peuvent jouer et développer leur motricité, des jeux en bois brut et des plantations. Ce nouvel équipement va également nous permettre de développer des propositions culturelles pour les enfants de 0 à 6 ans.
Didier Gilles : Nous avons d’abord placé des capteurs pour la surveillance et l’analyse de la qualité de l’air intérieur et fait une analyse énergétique des bâtiments. Puis nous avons lancé un processus sur deux ans pour que toutes les crèches obtiennent le label Écolo crèche.
Dans toutes les crèches, nous avons maintenant des composteurs, un potager, des récupérateurs d’eau et nous avons végétalisé les cours qui manquaient d’arbres. Nous avons revu le chauffage d’un des bâtiments et avons installé des panneaux solaires en autoconsommation collective sur un bâtiment intercommunal pour alimenter les crèches. Cela a aussi l’avantage de faire baisser nos factures d’électricité.
Le personnel a aussi suivi des formations dédiées. Par exemple, les agentes et les agents ont appris à faire des activités avec les bébés et jeunes enfants avec des matériaux naturels pour éviter les peintures industrielles chimiques. Il y a eu un important travail de sensibilisation tant au niveau des écogestes – consommation d’eau et d’électricité – que de l’utilisation de produits de nettoyage « verts ». On espère que cela se répercutera aussi sur les parents, à travers les bricolages que les enfants ramènent chez eux et les discussions qu’ils peuvent avoir avec le personnel.
Comment ont réagi les familles, les personnels et les professionnels de la petite enfance ?
Coralie Cocheteux : Le personnel a été très impliqué dans le projet dès le départ. Il était attendu depuis longtemps ! Nous nous sommes appuyés sur les besoins des familles, des assistantes et assistants maternels et leurs connaissances professionnelles. Les retours sont très positifs. Ce nouveau lieu a dynamisé leur métier, les valorise, leur donne du sens. Les familles ont participé activement et les retours sont très positifs. Elles sont fières d’avoir un service de cette qualité dans cette petite commune d’Île-de-France.
Par ailleurs, nous avons une micro-crèche sur le territoire que nous avons accompagnée. Nous nous sommes assurés que ce projet ne répondait pas qu’à des aspirations financières et que l’enfant était bien au cœur du projet.
Didier Gilles : Il y a eu quelques inquiétudes au démarrage et des réticences de certains agents et agentes. Puis tout le monde a joué le jeu. Nous espérons aller plus loin, ce label est une première étape. Il a permis d’embarquer les équipes, les élues et élus, dans une démarche affirmée pour des crèches plus écologiques et plus saines.
De plus, nous n’avons pas augmenté les tarifs des crèches. C’est un vrai choix politique. Chaque place en crèche représente un budget de 5 000 € par an et par enfant pour l’intercommunalité. Cela explique pourquoi certaines mairies préfèrent passer par une délégation de service public. Mais avoir des crèches en régie qui proposent un service de qualité est un élément de l’attractivité du territoire.
Propos recueillis par Laure Haag.