Enfin l’interdiction du démarchage téléphonique !

06 mars 2025

L’Assemblée nationale a adopté à l’unanimité la proposition de loi sur l’interdiction du démarchage téléphonique. Retrouvez l’intervention de Delphine Batho :

« Enfin ! Enfin, l’Assemblée nationale entend l’exaspération de nos concitoyennes et de nos concitoyens face au harcèlement commercial permanent du démarchage téléphonique.

Chers collègues, les bonnes nouvelles sont tellement rares dans le tournant historique que nous sommes en train de vivre, avec le risque de guerre qui revient en force dans nos vies quand la génération de nos parents, de nos grands- parents ont tant souffert et tant fait pour que nous puissions vivre dans une France et une Europe en paix, que nous disons et que nous affirmons qu’en même temps que nous sommes prêts à prendre notre part à l’effort nécessaire pour défendre la démocratie, notre pays et l’Europe, si on pouvait régler les problèmes de la vie des gens, si on pouvait au moins un peu agir contre des problèmes qui empoisonnent le quotidien, apporter un peu de mieux, un peu de paix, un peu de qualité de vie, cela contribuerait à l’indispensable cohésion de la nation dans les circonstances actuelles. L’interdiction du démarchage téléphonique fait partie de ces petites bonnes nouvelles, modestes certes, mais tellement attendues tant il pourrit la vie de tous les jours.

Si ce jour où l’Assemblée nationale peut confirmer et même améliorer son vote du 27 janvier dernier, si ce jour est possible, ce sera d’abord grâce aux centaines de milliers de citoyennes et de citoyens et aux associations et singulièrement à l’UFC- Que Choisir, qui ont dénoncé avec constance le harcèlement moral du démarchage téléphonique commercial, qui se sont mobilisés, qui ont interpellé les élus. Cela a été long, mais cela n’a pas été vain.

Longtemps, ce harcèlement a empoisonné principalement les lignes de téléphone fixes, celles qu’utilisent encore les habitants de nos territoires ruraux, les retraités, nos anciens. Mais prête-t-on dans notre société une oreille suffisamment attentive aux attentes de la ruralité et des plus âgés de nos compatriotes ? Hélas, non ! Il a fallu que ces appels intempestifs envahissent à leur tour les lignes des téléphones portables et les écrans des smartphones de façon massive pour qu’enfin ça avance.

Merci au groupe des Démocrates, à Louise Morel et à mon collègue du Poitou, Pascal Lecamp, d’avoir inscrit à l’ordre du jour le texte dont nous espérons qu’il sera, comme au Sénat, comme ici le 27 janvier dernier, adopté à l’unanimité.

Il faudra suivre jusqu’au bout le parcours de cette loi pour qu’elle devienne effective, jusqu’au bout car la malice est dans les moindres détails et nous voulons un texte avec zéro faille.

Chers collègues, le combat pour l’application des principes du RGPD au démarchage téléphonique, nous le portons à l’Assemblée nationale depuis plus de 7 ans. En 2021, le groupe Écologie, Démocratie, Solidarité avait proposé une loi interdisant le démarchage non consenti. Dans les trois lois qui ont été discutées ici depuis 2020, nous avions proposé par amendement le principe de l’opt-in qui avait été rejeté.

Nous nous réjouissons que cette proposition dépasse enfin les clivages partisans.

C’est pour nous un combat emblématique de l’écologie populaire, concrète, du quotidien, tant les appels commerciaux intempestifs illustrent les méfaits de la société d’ultra-consommation qui fait de nous des clients en permanence. Nous sommes cernés par les algorithmes, le pillage de nos données, submergés de sollicitations, envahis par la publicité, saturés d’injonctions à souscrire, acheter, consommer, partout, tout le temps.

Or, en République, tous les temps ne sont pas ceux de la consommation. Il y a le temps du repos, le temps familial, le temps du travail, le temps pour les activités non marchandes, le temps pour soi, le temps pour la citoyenneté. Rien ne peut justifier de laisser perdurer des stratégies commerciales qui envahissent la vie privée. La République doit garantir à chacune et à chacun le droit à la tranquillité.

Elle doit tourner la page de ce que Jérôme Fourquet appelle le « stato- consumérisme », qui donne le primat à la surconsommation de l’inutile comme principal moteur de l’économie, avec pour corollaire l’importation de quantités de marchandises fabriquées au bout du monde, la baisse du pouvoir de vivre, la délocalisation des emplois et des industries au détriment de l’économie, de l’utile et de la proximité. Ce modèle épuisé détruit la planète, provoque la surchauffe écologique et n’assure pas à toutes et tous les conditions d’une vie digne. Il ne nous rend pas heureuses et heureux. »