08 juillet 2025
« On retiendra que c’est au lendemain d’une canicule rouge, et au moment même où nos pompiers combattent les flammes, où des habitantes et des habitants sont confinés à Marseille et à Narbonne pour échapper aux incendies, que l’Assemblée nationale se prononce sur la proposition de loi Duplomb, du nom du sénateur qui considère que le réchauffement climatique « apporte plus d’avantages que d’inconvénients ».
Voilà qui résume l’obscurantisme de ce texte et je voudrais saluer la combativité du Groupe Écologiste et Social et de tous les députés opposés à ce texte quels que soient leurs bancs, et de toutes les forces de la société civile mobilisées contre son adoption.
Là où la loi Duplomb était camouflée derrière le verbiage de la levée des contraintes, là où elle aurait dû passer comme une lettre à la poste, malgré la manipulation inédite de la motion de rejet pour empêcher le débat, grâce à vous, tout le monde a bien compris qu’il ne s’agit pas d’une loi pour aider l’agriculture, mais d’une loi d’empoisonnement alimentaire.
Le gouvernement a perdu la bataille de l’opinion. Vous avez perdu les scientifiques, les malades des pesticides, les apiculteurs, toutes celles et tous ceux qui aiment la nature et qui ressentent du plus profond de leur être qu’il n’y a qu’une seule santé et que notre destin est uni à celui des sols, de la terre, des arbres, des oiseaux, des insectes, des cultures dont nous nous nourrissons et de l’eau que nous buvons.
Cette loi poison n’est pas juste un recul environnemental, un de plus parmi d’autres. C’est le feu vert donné à la déconstruction écologique : retour du poison des néonicotinoïdes qui tuent les pollinisateurs et intoxiquent les bébés dans le ventre de leur mère ; interdiction d’interdire les pesticides dangereux qui provoquent épidémie de cancers et maladies liées aux pesticides mutagènes, reprotoxiques, perturbateurs endocriniens ou PFAS ; atteinte portée à l’Anses, qui, certes, ne sera pas dans la loi, mais sera dans le décret, comme l’a confirmé la ministre de l’Agriculture ; fermes-usines avec leur cortège de risques sanitaires et d’algues vertes ; mal-adaptation au changement climatique pour la ressource en eau…
C’est un texte rétrograde qui s’attaque tous azimuts à l’édifice des règles édictées pour protéger la salubrité publique et la biodiversité. Voilà pourquoi j’ai parlé de Trumpisme à la française. Comme Trump qui sort de l’Accord de Paris, vous voulez sortir de la Charte de l’environnement de Jacques Chirac.
Sous la pression de l’extrême droite, il faut reconnaître au Président des Républicains et ministre de l’Intérieur d’assumer clairement son projet politique anti-écologie, comme la ministre de l’Agriculture qui revendique son soutien à la pétrochimie des pesticides, et même le ministre de la Santé qui ose prétendre qu’il n’y a pas de « preuves » de leur toxicité pour la santé humaine. Désormais, les faits ne sont plus les faits, la science n’est plus la science. Les données et les alertes des scientifiques, des médecins, des sociétés savantes sont balayées du revers de la main.
Comme partout en Europe, les milieux économiques se mobilisent pour briser tout compromis. Il n’y a plus de limite, plus de règle. Malheur aux plus faibles ! Aujourd’hui, c’est la soumission à l’agrochimie, l’alignement sur la concurrence déloyale, demain, ce sera l’habillage que vous êtes en train de rechercher pour faire accepter au pays l’accord avec le Mercosur.
Chers collègues, face à ces Destructeurs, la bataille de la santé environnementale ne fait que commencer.
Élue d’un territoire rural, je l’affirme : il n’est pas vrai que dans nos campagnes on demande plus de pesticides, plus d’élevages industriels, plus de captages d’eau potable qui ferment, plus de cancers des agriculteurs, plus d’enfants malades et encore moins de pollinisateurs.
Nous voulons des agricultrices et des agriculteurs dont les revenus sont garantis et protégés de la concurrence déloyale. Nous voulons des ruches qui bourdonnent, des campagnes pleines de vie et non un éternel printemps silencieux. Nous voulons des enfants en pleine santé, une alimentation saine et accessible à toutes et tous. Nous voulons en finir avec le poison de la malbouffe et des pesticides dans nos assiettes.
L’empoisonnement alimentaire inscrit dans cette loi touchera tous les Français, sans distinction politique, de gauche, de droite, du centre, peu importe. Ces clivages seront emportés par la nécessité que tout le monde ressent de protéger la santé.
C’est une certitude : quel que soit le résultat du vote, cette loi finira dans les poubelles de l’histoire, et l’offensive contre la santé et contre l’écologie sera défaite dans les années à venir.
Le groupe Écologiste et Social votera avec force contre la loi Duplomb. »
La vidéo de l’explication de vote contre la loi Duplomb par Delphine Batho à l’Assemblée nationale :