20 janvier 2021
Le projet de loi constitutionnelle présenté ce jour en conseil des ministres ne constitue pas une avancée décisive. La crédibilité de ce projet est forcément douteuse, alors que nombre de décisions récentes bafouent les principes que le gouvernement propose d’inscrire dans la Constitution et qui ne s’appliqueront qu’aux gouvernements et législateurs futurs.
La modification proposée de l’article 1er de la Constitution, pour symbolique qu’elle soit, souffre de carences évidentes :
- Le sujet « La République », n’a pas le même effet juridique que si la phrase ajoutée indiquait que c’est « la loi » ou « l’État » qui « garantit » la préservation de l’environnement ;
- La séparation opérée entre « biodiversité » « environnement » et « dérèglement climatique » interroge à l’heure où il faut au contraire privilégier une approche intégrée de l’ensemble des problématiques environnementales (biodiversité, climat, santé, ressources) au regard du dépassement des limites planétaires ;
- L’usage du verbe « lutte » s’agissant du changement climatique induit une obligation de moyens, là où l’Accord de Paris fixe une obligation de résultat ;
- Enfin et surtout, la réforme proposée ne comporte pas l’inscription à l’article 1er de la Constitution du principe de « progression constante » de la préservation de l’environnement, dont la récente décision du Conseil constitutionnel sur les néonicotinoïdes a prouvé qu’elle est indispensable.
Pour l’Alliance Écologiste, CAP21 et Génération Écologie l’introduction du principe de progression constante paraît le minimum pour que la révision constitutionnelle soit réellement utile et constitue une nouvelle étape renforçant la portée des dispositions de la Charte de l’environnement.
Sur le plan politique, la réforme proposée n’est en fait que très partiellement fidèle aux propositions de la Convention Citoyenne pour le Climat :
- La Convention proposait d’autres changements constitutionnels qui ont été écartés par le gouvernement. La modification proposée du Préambule, certes discutable dans sa rédaction et son emplacement, affirmait une intention claire ou louable : le fait d’inscrire clairement dans la Constitution que la conciliation entre différents objectifs à valeur constitutionnelle ne peut s’effectuer au détriment de la préservation de l’environnement. De même, la création d’un Défenseur de l’environnement avait pour objectif de s’assurer de l’effectivité des politiques écologiques.
- La Convention présentait elle-même la révision constitutionnelle comme essentiellement « emblématique », ayant vocation à couronner un ensemble cohérent de propositions concrètes et opérationnelles. Le gouvernement fait exactement l’inverse. Comme d’autres avant lui, il privilégie le symbole à l’action. Or le projet de loi ordinaire en préparation est indigent. Les propositions les plus significatives de la Convention Citoyenne sont méthodiquement enterrées. Ce texte ne permettra pas à la France de respecter ses engagements en matière de lutte contre le changement climatique, alors même que la « carence fautive de l’État » est en passe d’être reconnue par les tribunaux.
Pour l’Alliance Écologiste, CAP21 et Génération Écologie une révision technique de la Constitution, à supposer qu’elle soit votée dans les mêmes termes par le Sénat et l’Assemblée nationale, relève du Congrès.
Un référendum est une fausse bonne idée, qui ne rendrait pas service à la cause de l’écologie. Compte tenu de la nature des institutions de la Vème République, nous sommes opposés à la manœuvre politicienne qui consiste, pour le Chef de l’État, à faire du référendum un exutoire.
Delphine Batho, présidente de Génération Écologie
Jean-Marc Governatori, co-secrétaire national de l’Alliance Écologiste
Corinne Lepage, présidente de CAP21