21 janvier 2021
Hier, Joe R. Biden et Kamala D. Harris ont prêté serment et ont été officiellement investis Président et Vice-Présidente des États-Unis d’Amérique. Dès le premier jour de ce nouveau mandat, le Président Biden a signé la lettre formalisant le retour des États-Unis dans l’Accord de Paris sur le climat. Il s’agit d’une étape importante. Elle met fin au climato-obscurantisme officiel de la première puissance économique mondiale et du pays qui est le deuxième émetteur mondial de gaz à effet de serre. Le retrait des États-Unis annoncé par Donald Trump en juin 2017 avait stoppé le cycle d’engagement de la communauté internationale pour appliquer l’Accord. S’il est évident que la politique de la nouvelle administration américaine sera très probablement orientée autour de la « croissance verte », les décisions concrètes d’ores et déjà annoncées sont significatives (arrêt de l’oléoduc permettant l’exportation des sables bitumineux canadiens, moratoire sur l’exploration pétrolière en Alaska, réhabilitation de l’EPA, parcs nationaux…). Sur le plan diplomatique, il faut espérer que l’implication des Etats-Unis, au travers de l’envoyé spécial pour le climat John Kerry, qui était déjà le négociateur de l’Accord de Paris pour l’administration Obama, contribuera à enclencher une nouvelle dynamique.
Le peuple américain sort aujourd’hui de quatre ans d’une téléréalité quotidienne sordide. Quatre ans qui ont illustré ce que sont les Destructeurs au pouvoir : fake news, déchirements, complotisme, invectives, racisme, machisme, homophobie, et transgressions éthiques et judiciaires. Quatre longues années d’intensification de la destruction forcenée de l’environnement, d’inhumanité et de promotion internationale des autocrates de tous horizons. Les États-Unis sont aujourd’hui à un carrefour de l’Histoire.
La nouvelle administration aura ainsi fort à faire tant l’administration sortante leur aura laissé un pays et un monde en lambeaux. Depuis la guerre de Sécession, jamais l’Union n’aura été si durement mise à l’épreuve. Durant tout son mandat, le Président Trump a soufflé sur les braises des maux qui divisent l’Amérique. Un paroxysme a été atteint le 6 janvier dernier, où les fanatiques du Président battu ont envahi en armes le Capitole, cœur de la démocratie américaine.
La crise de la Covid-19 a aussi mis en lumière toutes les failles et inégalités de la société américaine. Des millions d’américains vivent dans une précarité extrême, sans emploi, sans protection sociale, sans moyen de payer les frais médicaux et dans l’obligation de recourir aux banques alimentaires. Les minorités ont d’ores et déjà payé un tribut disproportionné, illustrant les fortes inégalités raciales dans un pays où la ségrégation n’est pas un passé si lointain. Enfin, et c’est tout un symbole, le triste cap des 400 000 décès a été atteint le dernier jour du mandat de Donald Trump.
L’environnement, enfin, a été une autre grande victime de ce mandat cauchemardesque. La sortie de l’Accord de Paris a mis un frein immense aux efforts multilatéraux de lutte contre le réchauffement climatique. Mais, sur le plan intérieur, jamais un Président n’aura autant supprimé de zones protégées et de règlementations fédérales de protection de l’environnement. Alors que les incendies et grands ouragans se sont multipliés et que de nombreux records de température ont été battus, l’EPA (« Environment Protection Agency ») aura ainsi été réduite à une coquille vide, la science dénigrée et le réchauffement climatique relégué au rang de « canular chinois ».
La victoire inespérée des Sénatoriales en Géorgie le 5 janvier, combinée au succès du 3 novembre, offre à la nouvelle administration une majorité législative pendant deux ans. Il n’y aura pas une minute à perdre, tant les défis sont nombreux.
Militants écologistes, nous éprouvons un profond soulagement au départ du pouvoir de Donald Trump et au retour des États-Unis dans l’action internationale pour le climat. Même si nous connaissons les faiblesses et les limites de l’Accord de Paris, voilà qui ouvre la voie potentielle à un nouveau cycle d’action face à l’accélération du changement climatique. A n’en pas douter, cette nouvelle période permettra en tout état de cause aux mobilisations de la jeunesse de reprendre et de se faire mieux entendre.
Stéphane Meriau