Publié par JDD

L’ex-ministre du Logement est convaincue que la majorité des écologistes soutient sa ligne. Et n’est pas inquiète que quelques ténors, comme Jean-Vincent Placé, veuillent rallier Hollande.

Elle est de bonne humeur. Prête à fredonner les chansons de sa playlist, qui court de Serge Reggiani à David Bowie. Qui englobe une Marseillaise revisitée par des orphelins et une chanson d'Amel Bent, dans laquelle cette dernière "avance le cœur léger mais toujours le poing levé". L'air de la campagne, sans doute. Cécile Duflot était vendredi au Havre et à Rouen. Elle sera à Grenoble demain. En tout, une quinzaine de villes d'ici aux départementales. Pour soutenir parfois une alliance PS-EELV, parfois des listes écologistes autonomes. Et souvent, comme en Seine-Maritime et en Isère, pour appuyer des candidatures regroupant les Verts et tout ou partie du Front de gauche. Une nouveauté. L'ancienne ministre se félicite "du simple fait que ça existe", et de ce "travail en commun".

Revenir au gouvernement en cas de remaniement post-départementales? "Aucun signal de rassemblement n'est donné", tranche Duflot estimant que le Président ne cesse de s'éloigner des promesses du candidat. "Cela pose un problème démocratique", appuie-t-elle. Quant à Valls et à son usage du 49-3, cela la laisse songeuse : "Soit c'est un acte d'échec, soit il souhaite aller à l'affrontement et à la rupture pour reconstruire autour de lui." Elle en est convaincue : "La recomposition politique a du mal à mûrir, mais elle se fera autour de l'écologie."

"Ce parti souffre de sectarisme"

Évidemment, elle sait très bien ce qui se passe dans son parti. Que pour certains, tels François de Rugy, Jean-Vincent Placé ou Denis Baupin, "l'exercice des responsabilités gouvernementales" est "une obligation" comme ils l'ont affirmé dans un texte proposant "un pacte de responsabilité écologique". Elle sait aussi qu'ils sont minoritaires et que jamais le parlement d'EELV n'autorisera un retour au gouvernement. "S'il y en a qui y allaient quand même, ça ressemblerait au gang des losers", estime David Cormand, le numéro 2 du parti, persuadé qu'en plus Hollande n'y a pas intérêt. "Cela voudrait dire qu'il coupe définitivement les ponts avec nous jusqu'en 2017, et qu'il pousse Duflot à une candidature", estime un dirigeant écolo.

«Ce parti ne s'occupe plus beaucoup d'écologie et souffre de sectarisme»

"Le parti est dans une situation compliquée depuis la sortie du gouvernement et aujourd'hui, c'est devenu plus compliqué que ça ne l'a jamais été. Être une nouvelle composante du Front de gauche, cela ne marche pas", tacle Denis Baupin. Y a-t-il un risque de scission alors? "On ne peut jamais exclure ce genre de chose", répond celui qui dit vouloir éviter ce scénario. "Ce parti ne s'occupe plus beaucoup d'écologie et souffre de sectarisme. J'œuvre à un regroupement des écologistes de façon globale. Il faut se rouvrir à la galaxie écolo, du Front Démocrate à Cap 21, de Génération écologie aux autres", lance Jean-Vincent Placé, qui "préfère soutenir le Président plutôt que Jean-Luc Mélenchon".

Un regroupement de ces écolos pro-Hollande pourrait-il voir le jour, à côté d'EELV? Il y a quelques semaines, un conseiller élyséen a demandé à voir Duflot. L'option du deuxième parti prend du poids, lui a-t-il expliqué en substance. Info ou intox? "Cela me laisse indifférente", répond Duflot.

«Nous pouvons déboucher sur une sorte de fédération»

Depuis des mois, régulièrement, François Hollande reçoit Jean-Luc Bennahmias à l'Élysée. Mardi dernier, ce fut au tour de Corinne Lepage. Façon de montrer qu'il existe des écolos en dehors d'Europe-Écologie, et que tout ne passe pas par eux. Le rassemblement des écolos pro-Hollande? "Il nous dit "faites"", explique Bennahmias tout en sachant que c'est la pente du Président que de dire à ses interlocuteurs ce qu'ils ont envie d'entendre. À écouter Bennahmias, Placé et Baupin sont très intéressés à l'idée de créer un pôle écolo "pro-gouvernemental". "En cas de remaniement, leur poids dans un futur gouvernement serait plus important s'ils sont capables de regrouper des gens. Si tout cela suit son cours, nous pouvons déboucher sur une sorte de fédération", note ­Bennahmias.

En lien avec Génération écologie

La main tendue de l'exécutif va jusqu'à Génération écologie, cette petite structure qui survit encore. Le 6 janvier, son président, Yves Piétrasanta, était reçu par Manuel Valls à Matignon. Son bras droit, Angelo Giordano, assure avoir régulièrement au téléphone le conseiller de Hollande Vincent Feltesse et Yves Colmou, conseiller de Valls. Giordano, lui aussi, dit travailler au "regroupement" de ces forces écolos. Cela tombe bien : quelques jours après le deuxième tour des départementales, le 4 avril, tous ces écolos pro-Hollande se retrouveront à l'Assemblée à l'initiative de Denis Baupin. Bennahmias, Lepage, et des membres de Génération écologie seront là. Antoine Waechter aussi a été invité. Simple réunion ; ou délimitation, loin de Cécile Duflot, d'une nouvelle force politique?

Arthur Nazaret - Le Journal du Dimanche

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