08 mars 2023
Cette journée du 8 mars pour les droits des femmes, en pleine mobilisation aux côtés de l’intersyndicale, est l’occasion de faire le point sur les conséquences du projet du gouvernement pour les droits des femmes. Des droits que la réforme des retraites prévoit de fortement diminuer, aggravant encore un peu plus les inégalités déjà criantes entre les femmes et les hommes.
50 % les femmes gagnent moins de 1 000 euros par mois à la retraite. La retraite moyenne France est de 40% inférieure pour les femmes que pour les hommes. Or, d’après les projections de l’INED, cet écart ne sera toujours pas comblé en 2065. Et pour cause… Les calculs de pension et d’âge de départ à la retraite se basent sur nos activités professionnelles rémunérées. Mécaniquement, ils perpétuent les inégalités subies tout au long de la vie active. Ainsi, en 2016, selon l’INSEE, seulement 59% des femmes de 65 à 69 ans avaient validé une carrière complète. Le niveau de leur retraite en est donc naturellement affecté : moins de cotisations, c’est moins de pension !
Les femmes subissent déjà de plein fouet dans leurs vies actives les inégalités de salaire (28,5% en 2017) et des temps partiels (37% des mères isolées), les discriminations et les violences sexistes et sexuelles dans le monde du travail qui freinent leurs carrières… Celles qui font des enfants paient le prix fort. Leurs carrières sont dites “hachées” parce qu’elles font ce choix altruiste d’assumer des périodes de maternité qui ne seront jamais reconnues à leur juste valeur. Les carences à toutes les échelles en matière de garde d’enfants plongent dans la précarité les mères isolées (39 % des mères isolées vivent sous le seuil de pauvreté), et toutes les femmes qui se voient contraintes d’assumer inéquitablement ce rôle dans les foyers.
Et lorsque ce travail de soin aux personnes est effectué dans le cadre professionnel, il n’est pas non plus reconnu, les salaires ne sont pas à la hauteur. Ces secteurs occupés principalement par des femmes sont pourtant fondamentaux, nous l’avons vu pendant la crise du COVID, et impliquent une forte pénibilité, là aussi ignorée.
Travail à temps partiel, carrière hachée avec moins de trimestres, bas salaires, pénibilité… les femmes ne feront pas partie des heureux gagnants des 1 200 euros brut par mois, une annonce claironnée par un gouvernement démagogue en quête de légitimation. Et comme la durée de vie moyenne passée à la retraite est d’environ 25 ans, cette injustice n’est pas des moindres.
Pire, celles qui pouvaient prétendre à la retraite un peu plus tôt grâce aux trimestres acquis par enfant ne pourront plus véritablement bénéficier de cet avantage, condamnées à travailler jusqu’à 64 ans, le nouvel âge légal… Les femmes ayant eu des enfants, avec de moindres revenus, seront donc les premières victimes de la réforme, elles devront partir encore plus tard que les hommes pour obtenir leur pension de retraite à taux plein. Aujourd’hui déjà, 20% des femmes attendent l’annulation automatique de la décote à 67 ans pour partir à la retraite, contre 10% des hommes. Ce ratio ne fera que s’aggraver à l’avenir. Enfin, les femmes sont plus nombreuses à partir à la retraite sans occuper d’emploi (37 % contre 28% pour les hommes), ce qui pose naturellement – dans le système à venir – le problème de leurs moyens de subsistance en attendant d’atteindre l’âge légal. L’index senior envisagé n’y changera rien, à l’image de l’inefficacité de l’index égalité…
Et pour achever ce pitoyable tableau, ce sont les femmes qui assumeront 60 % de l’effort financier d’une réforme discriminante qui les pousse toujours plus dans la précarité ! Lors d’une séance de questions au gouvernement, au Sénat, en janvier dernier, Elisabeth Borne, Première Ministre déclarait « Je ne peux pas laisser dire que notre projet ne protégerait pas les femmes« . Eh bien nous pouvons affirmer clairement qu’il se situe dans le prolongement et l’aggravation d’un système sexiste.
Si cette réforme aggrave les inégalités entre les femmes et les hommes, c’est parce qu’elle n’envisage pas d’autre économie que celle qui produit des points de PIB. Le gouvernement se montre incapable de repenser la valeur du travail en dehors de sa valeur marchande, il s’enfonce dans un logiciel productiviste qui use autant les travailleurs et les travailleuses, que la planète.
Tout le travail gratuit, bénévole, altruiste, solidaire, qui est fait par les femmes tout au long de leur vie, et par les retraités ensuite, dans les foyers, dans les associations, auprès des autres générations, sont tout autant de services rendus à la société qui ne rapportent pas de points de PIB, ne sont pas comptabilisés pour la retraite, mais sont bien plus essentiels.
Il ne peut y avoir de justice dans cette réforme de retraite sans une prise en compte de la valeur du travail non marchand, de l’économie féministe, du bien-être et de la solidarité. Pour cette raison, Génération Ecologie sera aux côtés des Femmes en ce 8 mars pour défendre leurs droits, contre un projet de réforme aussi indigne qu’injuste !
Iris Bal & Anaïs Widiez