17 mars : la bataille pour la mémoire de la pandémie

16 mars 2025

Il y a cinq ans, le 17 mars, commençait le premier confinement de l’état d’urgence sanitaire face au Covid-19.

À cette occasion, Génération Écologie rend hommage aux victimes de la pandémie. Elle a fait plus de 170 000 morts en France et près de 7 millions dans le monde. Des victimes invisibilisées, dont on ne parle plus, auxquelles la Nation n’a jamais rendu hommage. Comme si, au déni de l’État face à l’arrivée et à la progression du virus, succédait aujourd’hui le déni de ses victimes. 

Nous sommes encore dans un état de stress post-traumatique, profond et collectif. Comme s’il fallait tourner la page de cette rupture historique, occulter ce temps où tout s’est arrêté, où nous avons été enfermés, privés de nature, munis d’une attestation pour le moindre déplacement, certaines et certains isolés dans une terrible solitude, quand d’autres jonglaient entre le télétravail et les enfants privés d’école. Ce temps a aussi été celui des remises en cause, où l’on s’est interrogé sur le sens à nos existences, sur le sens de l’essentiel. Où le pays a été tenu « par le bas » et grâce au dévouement de toutes celles et ceux qui travaillaient dur pour que le minimum soit assuré. Où l’État a décidé que sauver des vies était plus important que les profits. Où la société retrouvait le sens de la gratitude pour nos services publics en applaudissant les soignants, les personnels des hôpitaux et des Ehpad. 

Depuis, la course à la croissance a repris le dessus, pressé qu’était le système dominant que le « revivre comme avant » l’emporte sur l’envie de vivre autrement. Mais l’épreuve que représente la pandémie a marqué nos vies d’une empreinte indélébile. Les aspirations qui se sont exprimées pour ce que certains appelaient le « monde d’après », ou pour tout simplement vivre dignement et « atterrir », n’ont pas disparu. Elles cherchent un chemin alors que tout s’accélère dans un grand basculement du monde vers la guerre, le chaos climatique, l’effondrement du vivant, qui confirme chaque jour à quel point elles sont légitimes et urgentes. 

Voilà pourquoi, dans le moment actuel, la mémoire de la pandémie est nécessaire. Elle est l’objet d’une bataille portée par les familles des victimes, des personnes atteintes de Covid-long, des médecins, des scientifiques, des associations. Elle s’appuie sur les travaux de l’institut Covid-19 Ad Memoriam qui collecte les témoignages des citoyennes et citoyens. Elle est relayée à l’Assemblée nationale par une nouvelle proposition de loi. Elle s’est pour l’instant heurtée à la froideur de la verticalité de l’État. Le pouvoir ne veut pas rouvrir le chapitre du Covid pour ne pas regarder en face les limites des logiques présidentialistes, technocratiques et bureaucratiques face aux crises majeures. Et encore moins ouvrir le chapitre de la remise en cause de nos modes de vie consuméristes et des vulnérabilités qu’ils engendrent. 

La France ne pourra pas relever le défi de sa résilience si la mémoire du Covid est un tabou. Ce que la pandémie nous a appris, mais aussi l’ingéniosité de tous les « systèmes D » qui se sont mis en place, les capacités d’auto-organisation spontanées de la société qui se sont déployées, sont un trésor sur lequel prendre appui pour les temps à venir. 

Delphine Batho