06 mai 2019
La nature est entrain de mourir. C’est la conclusion implacable du rapport de l’IPBES.
On aimerait que celui-ci provoque un sursaut de la communauté internationale, saisie d’une prise de conscience nouvelle sur l’effondrement de la biodiversité.
Il est probable qu’il n’en sera rien car à l’heure même où des dirigeants viennent la main sur le cœur tenir quelques discours larmoyants sur le sort du vivant, ils décident par exemple en France « en même temps » le démantèlement du droit de l’environnement, la remise en cause des prérogatives du Conseil National de la Protection de la Nature et des sites classés, et continuent d’autoriser des projets destructeurs comme Europacity, le Grand Contournement Ouest de Strasbourg, le Center Parc de Roybon, et tant d’autres, en dépit des nombreux avis défavorables des diverses instances de protection de la nature. Il est toujours question également, d’autoriser le projet de Montagne d’Or, en pleine forêt amazonienne guyanaise, situé entre deux réserves biologiques intégrales.
Le rapport de l’IPBES est pourtant cinglant dans ses conclusions. Fruit du travailde 450 experts internationauxpendant trois ans, la première évaluation mondiale sur l’état de la biodiversité confirmele « rythme sans précédent » avec lequel « la nature décline globalement dans le monde ».
Prèsd’un million d’espèces animales et végétales sont menacées d’extinction. Plus alarmant encore, selon l’IPBES, plus d’un demi-million d’espèces terrestres peuvent déjà être considérées comme des « espèces mortes ambulantes » si leurs habitats ne sont pas restaurés.
Nous avons atteint, et peut être dépassé, lepoint de bascule. Selon les scientifiques eux-mêmes, la sauvegarde des écosystèmes et la préservation de l’habitabilité de la terre exigent un changement fondamentaldes systèmes financier et économique mondiaux.
Parmi les causes de lasixième extinction de masse, le rapport de l’IPBES pointeles conséquences cumulées du changement d’utilisation des terres, de l’exploitation directe des ressources, notamment la surexploitation des animaux, plantes et autres organismes via les récoltes, l’exploitation forestière, la chasse et la pêche, les pollutions, la prolifération des espèces invasives liée àla dynamique des échanges commerciaux,ainsi que le changement climatique qui exacerbe les effets des autres pressions sur les écosystèmes.Nos modes de vie et l’expansion économiquequi entraînent une augmentation de la demande d’énergie et de matériaux, sont directement en cause.
La sacro-sainte croissance économique est en fait l’indicateur de la destruction de la nature. Voilà pourquoi tous les partis qui prétendent s’être approprié les enjeux écologiques mais préconisent toujours peu ou prou la relance de l’activité économique ou une écologie de marché sont dans l’erreur.
Génération Ecologie appelle à une rupture claire avec aussi bien lelibéralisme que lesocialisme, projets politiques basés sur la croissance infinie de la production de richesse qui est à l’origine de l’effondrement de la biodiversité. L’enjeu fondamental est désormais de respecter les limites planétaires et de reconstruire par une politique d’écologie intégrale une relation harmonieuse à la nature, dont les humains font partie.
L’évaluation mondiale sur l’état de la biodiversité réalisée par l’IPBES, comme le rapport du GIEC SR 15 sur le climat, ouvre donc une nouvelle période politique. Un nouveau clivage lié au respect des limites planétaires est en train d’apparaître, opposant Terriens et Destructeurs.
Delphine Batho, Présidente