Publié par EurActiv.fr

Annick Girardin est secrétaire d'État au Développement et à la Francophonie. Elle développe de New-York son bilan du sommet pour le climat, en insistant sur le progrès du Fonds vert.

Le sommet international sur le climat s’est déroulé à New York le 23 septembre. Quel bilan en faites-vous ?

Ce que la France attendait de ce sommet, tout comme Ban Ki Moon, c’était une mobilisation. Et il y a eu une vraie mobilisation, qui donne bon espoir d’obtenir des résultats aux prochaines conférences, à Lima comme à Paris. L’objectif est d’arriver à un accord global, pensé par tous, qui associe l’éventail de solutions aujourd’hui disponibles pour lutter contre le changement climatique. Les manifestations de dimanche ont montré que les populations étaient vraiment impliquées dans cette lutte.

Quelle est la principale avancée de ce sommet ?

Il faut être fier de l’action de la France. Grâce à nous la capitalisation du Fonds vert pour le climat devrait évoluer rapidement. Nous nous sommes engagés à investir 1 milliard de dollars dans ce projet, et nous allons travailler à réunir un total de 10 milliards de dollars d’ici le mois de novembre. Le fonds est pour l’heure alimenté à hauteur de 2,5 milliards de dollars, et nous attendons les réponses des pays scandinaves, du Canada ou encore du Japon.

Mais il ne s’agit pas de la seule source de financement envisageable. Nous travaillons aussi sur les nouvelles formes de financement, et elles sont nombreuses, qui pourraient contribuer à sauver le climat.

Sur l’accord en lui-même, nous faisons en sorte que les engagements de chacun des pays pour la conférence de Paris fin 2015 soient sur la table le plus vite possible.

Comment la France va-t-elle financer sa participation au Fonds vert ?

Il y a des questions techniques qui restent en suspens, comme le partage entre dons et prêts de cette contribution, ainsi que le planning. Ces sujets n’avaient pas leur place dans le discours du président et n’ont pas encore été évoqués, ils seront arbitrés par la suite.

Quels sont les autres outils disponibles pour lutter contre le changement climatique ?

Il faut aussi penser aux nouvelles solutions financières. 10 milliards, ce n’est pas la réponse à tout ! La France milite pour accélérer la mise en place de la Taxe sur les transactions financières au niveau européen, et d’autres outils sont aussi à l’étude et seront annoncés ces jours-ci.

Enfin il y a la question de la mise en place de nouveaux objectifs de développement pour le millénaire. En plus de la question climatique, il faut répondre à la question de la lutte contre la pauvreté dans le monde, et cette lutte doit être menée en parallèle.

Est-ce que les États-Unis, second émetteur de CO2 après la Chine, sont prêts à mettre de l’argent sur la table pour le climat aujourd’hui ?

Nous espérons bien faire en sorte que nos partenaires nous rejoignent, que ce soit dans le Fonds verts ou avec les autres outils, sur lesquels nous tentons de les mobiliser, et on y arrivera.

Vous avez participé à plusieurs réunions avec les pays en développement à New York. Quelles sont leurs craintes et leurs demandes ?

Les pays en voie de développement demandent des réponses concrètes, et le plus rapidement possible. Ils vivent la crise climatique dès aujourd’hui, et il faut prendre conscience de cela. Le soutien financier est indispensable, mais ils ont aussi besoin de soutien en ingénierie pour pouvoir anticiper et s’adapter. Qu’il s’agisse de montée des eaux ou de sécheresse, les problèmes peuvent être mis en lumière en amont. La France a notamment contribué à déplacer un village de plusieurs kilomètres dans les îles Samoa, qui était menacé par la montée des eaux. Ce genre de projet s’avère crucial.

En quoi la France peut-elle avoir un rôle sur ces problèmes qui se déroulent sous des latitudes lointaines ?

La France a le second domaine maritime au monde, et avec les territoires d’outre-mer elle est exposée de façon cruciale au changement climatique, que ce soit en Polynésie française ou dans les Caraïbes. Nous avons déjà commencé à adapter nos politiques pour systématiquement prendre en compte dans les opérations de développement la dimension climatique. Tous les projets de l’AFD intègrent ce volet à partir de 2015, comme tous les projets de développement qui seront désormais financés par la France. C’est ce qui est inscrit dans la loi sur le développement adoptée au printemps.

Le président Hollande a insisté sur le fait que le réchauffement climatique était responsable de davantage de déplacements de populations que les guerres et les conflits. La création d’un statut de réfugié climatique est-elle envisageable ?

La question du réfugié climatique doit être au centre des préoccupations : ces personnes doivent avoir un statut, il faut trouver des réponses. Sur certaines îles le problème est déjà criant, donc il faut étudier les solutions : soit on les déplace en hauteur sur leur propre île, soit on les accueille ailleurs. Je viens de St Pierre et Miquelon et je suis particulièrement sensible à ce sujet. La question d’un statut du réfugié climatique pourrait être crée à l’occasion de la conférence de Paris Climat 2015.

Le budget 2015 va bientôt être présenté en France ; il avait déjà baissé en 2014. Quel sort lui est réservé en 2015 ?

L’aide publique au développement, comme tous les budgets nationaux va être touchée par le plan de réduction des dépenses. Tout le monde a fait un effort, mais on garde la possibilité d’agir à la hauteur de nos ambitions. Et puis il faut garder en tête que l’objectif actuel c’est d’améliorer la transparence de l’aide. Plutôt que d’avoir au centime près le même montant, il faut s’assurer de l’efficacité de l’aide qui est décaissée.

Est-ce que cela veut dire que l’objectif d’investir 0,7 % du revenu national brut dans l’aide au développement est oublié ?

Non, il est inscrit dans la loi, et nous tenterons de nouveau de l’atteindre lorsque la croissance sera au rendez-vous.

Aline Robert

 Annick Girardin, au Quai d'Orsay

Annick Girardin, au Quai d'Orsay

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