Publié par Marcelle TERMOLLE

La conversion écologique de la société.

La société a intégré la responsabilité humaine dans le réchauffement climatique. Il n’y a plus guère de discussion sur ce point. Tant les Chinois que les Américains ont ratifié les objectifs définis par la Cop 21, c’est une première. Et c’est bien parce que nos sociétés se sont approprié ce concept que les mesures prises dans le cadre de la transition énergétique ne souffrent plus de contestation. Il y a des résistances sur la manière mais, en réalité, plus sur le principe ce qui facilite la mise en œuvre des politiques publiques dans les territoires.

En revanche, je ne pense pas que le danger immense que représente l’érosion inquiétante de la biodiversité ait atteint les citoyens.

Trop nombreux, trop gourmands, nous empiétons sur les ressources dévolues aux autres espèces vivantes sur la terre. La biodiversité est en chute libre. On ne le voit pas parce que nous sommes dedans, nous faisons partie de cette biodiversité et d’une autre part parce qu’une très grande partie des populations humaines vit essentiellement dans les villes. Il a été établi, il y a quelques années seulement, que la sixième extinction massive des espèces a débuté précisément avec l’expansion de l’homme hors du berceau africain. Notre espèce a bâti sa suprématie sur son succès reproductif, son succès adaptatif et sur sa capacité à contourner les règles et s’approprier des ressources qui ne lui étaient pas destinées. Résultat : l’humanité est aujourd’hui l’espèce invasive la plus dévastatrice qui soit.

L’être humain se comporte comme s’il était la seule espèce présente sur terre et que la terre et ses ressources étaient sa propriété exclusive. Il se comporte en propriétaire alors qu’il n’en n’est que le locataire, fugitif, le temps d’une vie. [1]

Cette biodiversité n’est pas là pour faire joli. Elle a une valeur. Elle a même DES valeurs : monétaire, patrimoniale et esthétique. La biodiversité fournit des services écologiques. Ils ont été chiffrés. Le rapport stratégique rendu au gouvernement sur la valeur économique de la biodiversité en 2009 s’intitule : Approche économique de la biodiversité et des services liés aux écosystèmes. On ne peut être plus clair.

La Nature fournit de l’eau, de la nourriture, des molécules pour la pharmacopée. La Nature pollinise, purifie l’eau, l’air, entretient les sols. Elle pilote sans qu’on s’en préoccupe les grands cycles biochimiques de l’azote, du carbone, du phosphore, la photosynthèse pour ne citer que ceux là sans lesquels il n’y a pas de vie possible. En plus elle nous fournit des services culturels liés aux valeurs récréatives de ses trésors que nous valorisons dans le tourisme. Tout cela a un coût, une valeur, quantifiable en argent à la fois monétaire, patrimoniale, esthétique, inestimable.

Je considère que notre modèle social ou notre agriculture paysanne sont des valeurs patrimoniales de la France et des Français. Elles devraient être reconnues, cela figure dans le programme de Génération Écologie, comme une sorte d’extension de l’exception culturelle. Ces valeurs patrimoniales sont gravement menacées par les traités transatlantiques le TAFTA et le CETA qui suit dans la foulée. Des multinationales aussi puissantes que des états prétendent nous dire ce que nous allons mettre dans nos assiettes. La normalisation, la standardisation s’imposent. Nous devons être tous coulés dans le même moule celui de la mondialisation. Est-ce soutenable ? NON.

Nos modes de consommation des ressources naturelles sont-ils durables ? Soutenables ? Non ! Non seulement les ressources sont limitées mais les modes de vie, l’écosystème humain à l’échelle planétaire a entraîné des différentiels de développement délétères pour la société. Le coût humain de nos modes de production et de consommation est exorbitant. Et ce n’est pas moi qui le dis mais la NASA qu’on ne peut pas taxer d’être une officine gauchiste.

Les chercheurs de la NASA ont revisité les équations bien connues des écologistes qui régissent les relations entre les prédateurs et les proies. On a tous appris ceci au lycée : beaucoup de proies, beaucoup de prédateurs. Ces derniers mangent les proies, ils prolifèrent et exercent une pression sur la nourriture telle qu’elle se raréfie et que les prédateurs meurent en masse de faim. L’équilibre est restauré. Mais dans le cas des êtres humains qui vivent dans des sociétés très hiérarchisées, une minorité a tendance à s’approprier davantage de ressources qu’elle thésaurise. Cette minorité devient de plus en plus riche tandis que le peuple s’appauvrit. Bien protégés, les nantis, les élites ne voient pas à quel point le peuple s’affaiblit, jusqu’au moment où il est trop tard, l’ensemble de la société s’effondre, la civilisation meurt. De nombreuses sociétés humaines ont connu ce sort. Aujourd’hui, dans une économie mondialisée, au sein d’un écosystème humain unique, ces situations, si elles ne sont pas maîtrisées, peuvent avoir des conséquences extrêmement dommageables.

Mon objectif n’est pas de faire peur. Génération Ecologie n’est pas une secte millénariste qui se plait à annoncer l’apocalypse tous les six mois. Comme écologiste, mon objectif est tout autre. Je suis à peu près certaine que, dans notre pays, tout le monde a compris les enjeux de la transition énergétique sur le réchauffement climatique. Par contre, l’importance essentielle de la biodiversité pour notre propre survie, n’est pas encore entrée dans la culture de nos sociétés. Je ne crois pas davantage que l’on ait compris à quel point ces écarts de développement, ces distorsions dans la répartition des richesses peuvent s’avérer mortels pour nos sociétés. La société civile ne s’est pas approprié ces notions. C’est là-dessus qu’il nous faut désormais battre le fer. Faute de quoi il n’y aura pas de consensus pour mettre en œuvre les politiques publiques de nature à les rencontrer.

[1] Voir annexe : Charte des droits de l’homme et de la Nature.

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