Tafta or not Tafta - par Marcelle Termolle
Tafta or not Tafta et si l’arbre cachait la forêt : le traité transatlantique ne doit pas détourner l’attention des importations d’ OGM.
On peut légitimement s’interroger. Car, pendant que les négociations des traités transatlantiques s’enlisent et subissent les derniers aléas diplomatiques créés par les écoutes téléphoniques des différents présidents notamment Français par les services secrets américains, en sous- main, lentement mais sûrement, les marchandises américaines et au premier chef les OGM que nous voudrions ne pas voir pénétrer le marché européen y entrent bel et bien.
D’où une légitime interrogation : le « grand bazar » du TAFTA serait-il poudre aux yeux pour mieux enfumer les opinions publiques tandis que chez Monsanto, Bayer, Dupont de Nemours et BASF, on se frotte les mains de satisfaction. Et pour cause !
L’une des réticences des Européens est liée aux l’importation d’OGM. Or, l'Union européenne a autorisé, le 24 avril, l'importation et la commercialisation de 19 OGM supplémentaires, portant à 75 le nombre d’OGM autorisés sur le sol européen. L'autorisation est immédiate et vaut pour dix ans. Pour être précis dix nouvelles autorisations d'utiliser des OGM dans l'alimentation humaine ou animale ont été accordées ainsi que sept renouvellements d'autorisations et deux autorisations d'importer des fleurs déjà coupées, des œillets, en l’occurrence. Onze produits de la multinationale américaine Monsanto figurent parmi les organismes autorisés, a précisé la Commission européenne. Les autres sont des produits des firmes américaines Dupont et des groupes allemands Bayer et BASF.
Il s’agit bien d’importer, pas de cultiver des OGM sur le territoire européen. Un seul et unique OGM est actuellement autorisé pour la culture, le maïs MON810 de Monsanto. Il n’en demeure pas moins que désormais, 75 OGM sont autorisés à l'importation pour la commercialisation dans l'UE pour l'alimentation animale et humaine. Le tourteau de soja génétiquement modifié est la principale source de protéines pour le bétail. L'UE en a importé 18,5 millions de tonnes en 2013, selon les données de la Commission elle- même. 90% des importations proviennent de quatre pays, les Etats-Unis, le Brésil, l’Argentine et le Paraguay. Ils sont génétiquement modifiés et entrés plus ou moins à l’insu du consommateur dans la chaine alimentaire. Ces demandes d'autorisation étaient en attente depuis plusieurs années. Mais les États n'ayant pas réussi à s’accorder, la Commission a pris la décision finale et ouvert les frontières de l’Union. Résultat, l'autorisation est immédiate, elle vaut pour dix ans et s'impose à tous les États, y compris à ceux qui s'y étaient opposés, 19 états quand même dont la France ! Jean-Claude Juncker a par conséquent fait sa proposition et a lancé les autorisations sans attendre que les États prennent position.
Pour « rassurer » les États qui refusent les OGM, la Commission propose qu’ils prennent au cas par cas la décision d’interdire ou d’en retreindre l’usage. Ce qui est impossible bien entendu, les marchés étant ouverts à l’intérieur de l’Union. Comment s’assurer que les denrées importées n’en contiennent pas. Quant à la Commission elle a beau jeu de dire que ni les États, ni le Parlement européen n’ont été capables de se mettre d’accord. Tout bénéfice pour les multinationales de l’agro alimentaire et débâcle pour les opposants aux OGM.
Le principal reproche que l’on peut adresser aux OGM est l’incertitude qui pèse sur leurs effets sur la santé humaine et animale et le risque de voir des plantes génétiquement modifiées se répandre dans la nature et s’y substituer au détriment de la biodiversité. Reste que l’on ne peut sacrifier la santé publique sur l’autel des intérêts d’entreprises privées dotées de puissants moyens qu’ils n’hésitent pas à mobiliser afin de décrédibiliser leurs opposants. Que l’on se souvienne de la manière dont fut éreintée l‘étude de Gille-Eric Seralini, d’abord publiée, ensuite dé publiée et enfin republiée portant sur le maïs NK603 fabriqué par Monsanto et résistant au roundup. Personne ne peut oublier l’acharnement contre ce chercheur. L’avenir dira s’il avait raison ou pas. L’objectivité ne se situe pas dans quelque dogmatisme pour ou contre tel ou tel OGM mais dans des études sérieuses conduites par des laboratoires indépendants des grands groupes qui commercialisent ces OGM. À ce propos, une étude diligentée par l’Union européenne a débuté en avril 2014. Elle permettra de connaître les effets du maïs NK603 traité ou non au roundup sur des rats nourris pendant 2 ans. Une deuxième étude est conduite par la France sur 6 mois seulement. Quoi qu’il en soit, la Commission n’a pas attendu les résultats ni de l’une ni de l ‘autre avant d’autoriser l’importation et l’usage de ces céréales dans l’alimentation animale et par voie de conséquence humaine.
On ne peut qu’inciter les pouvoirs publics à prendre des dispositions légales afin d’interdire sur leur sol la culture et la circulation de ces OGM.
Liste des nouveaux OGM autorisés dans l’Union européenne.
pour le maïs : MON 87460
pour les sojas : MON 87705, MON 87708, MON 87769, 305423 et BPS-CV127-9
pour le colza : MON 88302
pour les cotons T 304-40, MON 88913 et LLCotton25 × GHB 614.
A celles-ci s'ajoutent 7 renouvellements :
pour les maïs : T 25 et NK 603, le colza GT 73
pour les cotons MON 531 × MON 1445, MON 15985, MON 531 et MON 1445.
Enfin la Commission autorise deux fleurs coupées transgéniques : œillets des lignées IFD-25958-3 et IFD 26407-2.
Marcelle Termolle. Journaliste.